Courir, courir, je ne pense plus quelques minutes par jours, ce
temps que je m'autorise a courir, m'envoler avec ma force vampirique a travers les clairières et les bois. Courir, ma joie depuis ces trente ans a les chercher. Courir, sentir le vent contre mes joues froides, voir mes cheveux s'envoler dans mon sillage, ne plus sentir la terre sous mes pieds. Courir, quand on est vampire c'est presque s'envoler.
A travers les bois, encore une fois, je sens que je fatigue, enfin, d'une fatigue étrange, inconnue des humains...Et une journée de plus sans succès. Je commence a me poser des questions, ai-je perdu ces trente ans alors? Sont-ils des mythes? Enfin, je chercherais toujours, car je ne peux plus, ma conscience ne peut plus supporter d'imaginer les amoureuses, les enfants, les femmes,les proches, les parents éplorés, effondrés, et tout ca pour quoi? Pour assouvir cette soif qui me ronge de l'intérieur.
Je m'installe tranquillement dans une petite clairière, près d'une petite ville grise... J'y passerais quelques heures afin de me reposer, de me calmer, de réfléchir. Mes yeux commencent a prendre la douce couleur de l'or liquide, des bijoux d'ambre qui ornaient autrefois mes décolletés. Depuis quelques semaines que je me force a suivre ce régime, même sans apprentissage, je me sens plus forte, plus vivante, mais plus émotive, tandis que d'un autre coté, je ressens une soif différente, plus ténue que celle concernant les humains.
Je pose ma besace et en sort un livre, un de ces livres qui vous prend aux tripes et qui vous fait oublier le monde autour de vous, et vos méfaits, et vos péchés... Un livre qui nous donne a réagir. Je pose ma t^te contre un nid de feuilles, mis en place au dessus d'un tronc mort pas mère nature. Ainsi, j'ai la tête au calme, je me sens bien, toute prête a plonger dans "Le Parfum".
Je commence a avoir cette douce impression de somnolence qui sied a un vampire fatigué quand une bourrasque arrive, quand quelqu'un vient. Peut-être... Mais non, c'est impossible, je ne les trouverais pas maintenant, pas dans cette ville grise et sans attraits... Ceci dit, j'ai erré dans toutes les grandes villes du monde longuement, sans voir trace d'eux...
Un blond est là, en face de moi, matérialisé avec la même vitesse que la mienne... Peut être moins rapidement... Mais il faut dire que j'ai des années d'entrainement, d'un coup d'oeil, je remarque que ses pupilles ont une couleur que les miennes n'ont pas encore prises, bien plus soutenue. Ma bouche s'entrouvre et je n'ose parler, en face de moi, un Cullen, un vrai... Un de ceux après lesquels je cours, ma langue ne m'obéit pas quand je veux saluer, je risque d'être prise pour une arriéré, mais non, le blond au maintien déconcertant et aux cicatrices plein le visage prend la parole, et pas d'un air très aimable.